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« Laisse tomber les filles » de Gérard De Cortanze (Albin Michel)

Littérature Sans Frontières • Fréquence Terre
Littérature Sans Frontières • Fréquence Terre
Episode • Feb 10, 2018 • 5m

 

« Littérature sans Frontières » est une chronique de Pierre Guelff.

Enfant de l’après-Seconde Guerre mondiale, je suis, donc, un baby-boomer qui, au fil du temps et des aléas de la vie, s’est parfaitement retrouvé dans des personnages et des situations du roman « Laisse tomber les filles » de Gérard De Cortanze, publié chez Albin Michel.

Inutile de préciser que les yéyés, traduisez « Nous sommes jeunes », selon Edgar Morin, philosophe et sociologue, j’ai bien connus ! J’y ajoute « Salut les Copains » (Générique de l’émission et couverture DVD : éditions Montparnasse), l’émission mythique d’« Europe 1 », que je devais écouter en cachette, puis « Campus » de Michel Lancelot, Mai 68, le combat ouvrier, ensuite la crise pétrolière pour mettre fin aux « Trente Glorieuses », comme disent les historiens. Mais, cette période de 1945 à 1973, « d’une exceptionnelle prospérité », prétendent-ils, ne l’était pas pour tout le monde.

Ancien ouvrier d’usine avant un radical changement de parcours professionnel, comment ne pas être d’accord avec l’auteur quand il décrit la classe ouvrière à laquelle j’ai appartenu comme suit : « Un monde où règnent la peur, les accidents du travail, les conflits sociaux, les fours qui explosent, la mort des ouvriers maghrébins respirant à pleins poumons la poussière de graphite… » ?

Mais, avant cette réalité, il y eut, effectivement, le temps des copains, la nouvelle vague, celle qui allait balayer beaucoup de choses sur son passage.

Un nouveau monde prenait naissance. Entre parents et ados, « c’était une véritable guerre de générations qui s’engageait » et certains éditoriaux tiraient à volonté sur cette jeunesse, qu’elle qualifiait de dépravée : « Salut les voyous ! », « Les blousons noirs envahissent la France »… Pourtant, nous écoutions Peter, Paul and Mary, Nina Simone, Jean Ferrat, censuré par le pouvoir, Léo Ferré et autres qui chantaient des hymnes à la paix, contre les guerres et les racismes, alors que certains découvraient le rock d’Elvis, de Vince Taylor, de Gene Vincent ou étaient des fans inconditionnels de Johnny, des « Chaussettes Noires » et de Sylvie, voire de Paul Anka, de Joan Baez, que tous revêtaient des jeans, gars comme filles, achetaient des 45 tours, et, surtout, que cette jeunesse en avait marre des interdictions, des restrictions, des brimades et des lois datant de Mathusalem et Napoléon qui brimaient le peuple.

Ainsi, durant 350 pages, l’auteur décrit avec une précision chirurgicale, et pour cause, ne déclara-t-il pas que « tout roman était autobiographique » (« Le Soir », janvier 2018) ?, le destin de François, rocker que les trips tentaient, Lorenzo, l’intello et sportif accompli, grand ami d’Antoine, fils d’ouvrier et gauchiste dans l’âme – ce qui n’est pas une tare, hein ! -, mais, aussi, de Michèle, féministe en herbe, dont tous les trois étaient épris et qui, dès ses 15 ans, envoya balader les amies et amis de ses grands-parents, qu’elle adorait, au motif qu’il s’agissait de « vieux cons » !

La rupture des générations s’étendait. Qu’en resta-t-il ? Que devint ce quatuor et tous les autres yéyés et rockers

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